Édité le 14 Déc 2022

Histoire : en savoir plus

De 1783 à nos jours…

… Plus de deux siècles retracent l’histoire de la Bergerie nationale de Rambouillet, deux siècles durant lesquels les notions d’expérimentation en élevage et de transmission du savoir ont toujours été les marques de fabrique, préservant ainsi les missions d’origine.

La ferme expérimentale  de Louis XVI

En 1783, Louis XVI achète le Domaine de Rambouillet à son cousin, le Duc de Penthièvre, qui le lui cède à contrecœur. Grand amateur de chasse, le roi y viendra 157 fois entre 1783 et 1788 ! Mais influencé par les physiocrates du Siècle des Lumières, Louis XVI participe à « l’agromanie » et souhaite aussi construire une ferme expérimentale pour étudier l’acclimatation d’espèces animales et végétales. En 3 ans, de 1783 à 1786, l’architecte Jean Thévenin bâtit la ferme modèle du roi dans son domaine personnel. Dès 1785, arrivent des vaches suisses, suivies de chèvres angoras de Turquie, d’ânes de Malte, de buffles venant d’Italie. Les chevaux de travail investissent également rapidement la ferme royale pour défricher et cultiver les terres ainsi libérées.

La cour royale

Elle n’abrite plus aujourd’hui d’animaux, mais sa vocation d’expérimentation et de formation n’a jamais quitté la Bergerie nationale, fidèle à la devise affichée au fronton du porche d’entrée de la cour : « Curat oves oviumque magistros » (L’école prend soin des moutons et de leurs maîtres).

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Le Mérinos de Rambouillet

L’objectif d’améliorer les races animales françaises se traduit surtout par l’introduction du mouton Mérinos en 1786. En effet, l’Espagne détient alors le monopole de la laine fine qu’elle vend à toute l’Europe grâce à ce mouton singulier. Les importations de laines fines et de draps de qualité en provenance d’Espagne coûtent très cher aux filatures françaises. Louis XVI obtient alors de son cousin, le roi d’Espagne Charles III, l’autorisation d’acquérir un troupeau de Mérinos pour son nouveau Domaine de Rambouillet. Constitué des meilleures bêtes des meilleurs élevages, un troupeau de 366 animaux arrive le 12 octobre 1786 à la ferme royale, après 4 mois de marche et plus de 1 200 km. Devenu troupeau national à la révolution, le précieux troupeau est conservé comme une richesse nationale. C’est à la fin du XVIIIe siècle que Napoléon Bonaparte, 1er Consul, lance une grande opération de « mérinisation » des races françaises. Des reproducteurs partent ainsi de Rambouillet afin d’être croisés avec des races locales pour améliorer la qualité lainière des troupeaux. 

À partir de 1851, le troupeau de Mérinos trouve une nouvelle vocation, celle d’améliorer les races des pays émergents de l’époque, eu Europe, mais surtout dans l’hémisphère sud. La très grande notoriété de la ferme et de ses Mérinos s’étend alors aux cinq continents.

Les physiocrates

Cette école, sans doute l’une des toutes premières théories économiques, est née en France vers 1750 et atteint son apogée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.
Les physiocrates fondent une doctrine économique et politique qui prône le développement économique à partir de l’agriculture, ainsi que la liberté du commerce et de l’industrie.
Considérant que la richesse d’un pays provient essentiellement de son agriculture, elle conduit beaucoup de nobles à s’intéresser aux recherches en agriculture et à effectuer des expériences sur leurs domaines.

Le développement  des formations

Dans la même dynamique de recherche et de transmission, la première école de bergers ouvre ses portes dès 1794, inaugurant ainsi une longue liste de formations zootechniques. L’école de bergers devint l’école nationale d’élevage ovin en 1934. Le troupeau Mérinos est alors un joyau national que tous les maîtres bergers s’attachent à maintenir dans le meilleur état possible. Leurs pratiques d’élevage et de conduite de troupeau sont reconnues dans le monde entier. L’Établissement de Rambouillet, avec son école de bergers et ses premières expérimentations d’insémination animale en France commencées en 1938 sur des bovins et des moutons, est au sommet de sa notoriété. Les techniques d’insémination sont mises au point dans le laboratoire dans l’angle de la cour royale, par les pionniers Laplaud et Cassou, qui fondèrent l’école en 1946. Le Centre d’enseignement zootechnique naît en 1955 en regroupant les écoles d’élevage ovin, d’aviculture et d’insémination animale. Le premier BTS Productions Animales est créé à la Bergerie en 1965 ainsi que l’emblématique BTS hippique au début des années 70. La Bergerie nationale est également pionnière pour la sensibilisation au concept de développement durable et sa déclinaison dans les programmes de l’enseignement agricole dès 1994.

Un patrimoine vivant de grande valeur scientifique

Outre son statut de race « conservatoire », le petit troupeau de Rambouillet sert toujours de référence et de support de recherche. Depuis 1786, le troupeau Mérinos n’a connu aucune introduction de sang extérieur. Il est ainsi conduit en consanguinité « raisonnée ». Au départ, la gestion de cette population est basée sur un principe simple : « ne faire reproduire entre eux que des animaux n’ayant aucun parent commun sur 4 générations ». Depuis 2005, grâce à la collaboration de l’INRA, l’Institut de l’Élevage et AgroPariTech, une nouvelle méthode de gestion de la variabilité génétique est appliquée, visant à minimiser l’augmentation de la consanguinité du troupeau. Un process informatique d’optimisation, basé sur 200 ans de données généalogiques, réalise les lots d’accouplement minimisant les degrés de parenté. L’expérience de consanguinité conduite depuis deux siècles, unique en son genre, fait du Mérinos une curiosité scientifique qui sert de modèle aux chercheurs pour construire une méthode adaptée à d’autres espèces animales en voie d’extinction.

Des expérimentations, toujours

Le Mérinos n’est pas la seule source d’expérimentations de l’établissement. La méthode s’appuyant sur les Indicateurs de Durabilité des Exploitations Agricoles est créée dans les années 1990 à la Bergerie, la quatrième version voyant actuellement le jour. La gestion de l’herbe, l’écopâturage, l’agroforesterie, l’apiculture, font également l’objet d’expérimentations sur site et transforment progressivement les paysages. La mise en place d’un Projet Alimentaire Territorial en collaboration avec le PNR de la Vallée de Chevreuse, le développement des circuits de proximité pour nos produits transformés, la collaboration renforcée avec Coop Bio Ile-de-France, redonnent une place importante à la Bergerie nationale sur le territoire et dans l’alimentation locale.

Retour vers le futur

La Bergerie est toujours située au cœur du Domaine de Rambouillet. Il est un des derniers représentants des grands domaines royaux du XVIIIe siècle. Il reste un exemple unique dans l’utilisation partagée des espaces entre agriculture, chasse et agrément. Théâtre des anciennes chasses royales, impériales puis présidentielles, le Domaine de Rambouillet offre une diversité paysagère façonnée par la chasse, bénéficiant directement au développement de l’agriculture biologique. Et inversement, son système en agriculture biologique est à son tour directement favorable au maintien des écosystèmes naturels. C’est donc grâce à la gestion partagée des espaces et à la complémentarité des activités, que le Domaine retrouve aujourd’hui sa marque originelle, riche d’une biodiversité singulière qui fait de nouveau référence au niveau scientifique.

La Bergerie nationale en détail…